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21 juillet 2010 3 21 /07 /juillet /2010 13:13

En 1979, Volker Schlöndorff adaptait Le tambour, un roman de Gunter Grass ayant fait polémique en son temps (1958) par la vision qu'il posait sur la Seconde Guerre mondiale dans une Allemagne aux plaies encore fragiles.
Schlöndorff, totalement possédé par son sujet, accouche d'une mise en scène puissante, à la fois épique et réaliste, qui porte les 2h20 de film avec un souffle et une générosité uniques.  Dans Le tambour, la violence côtoie l'humour, le grotesque se marie au sublime, la sensibilité fusionne avec le pathétique: c'est de ce mélange audacieux que naît un film profondément original, qui porte un regard nouveau sur le sujet de l'enfance confrontée à la guerre, et offre ainsi une alternative intelligente à d'autres films basés sur la même thématique (Requiem pour un massacre d'Elem Klimov et L'enfance d'Ivan d'Andreï Tarkovsky en sont les plus fameux exemples). Traversé par des séquences de magie absolue (la meilleure étant la longue scène de l'attaque de la poste, qui se conclut de façon totalement bouleversante), le film se démarque par cette atmosphère étrange, à la fois pesante et légère, terrible et hilarante. Le récit présente le conflit mondial et les relations humaines avec ambiguïté et subtilité. Le traitement des personnages est très fin: derrière les apparences, chacun révèle ses failles et ses sentiments, et ce, jusqu'aux moindres seconds rôles. Le personnage principal, Oskar, est un enfant pétri d'ambiguïtés: attachant par sa spontanéité, ridicule par son état d'esprit de supériorité, touchant par les mésaventures qu'il subit, c'est un enfant au caractère bien trempé, qui méprise le monde des adultes et refuse de grandir, alors qu'il ne cotoie que des adultes. A travers ce personnage, l'auteur confronte la barbarie de la guerre à l'innocence de l'enfance, le monde triste et hypocrite des adultes à l'insouciance de l'enfance. Le récit, adapté d'un roman, se révèle d'une richesse thématique exceptionnelle: en suivant la montée jusqu'à la chute du nazisme dans la ville de Dantzig, Le Tambour s'impose comme un film à valeur historique, même si le coeur du récit se concentre sur des personnages, et sur le tumulte des sentiments, où se mêlent amour, espoir, violence et résignation. Mené par la révélation David Bennent, qui, du haut de ses 13 ans, insuffle une énergie jubilatoire au personnage d'Oskar, le reste du casting se révèle de grand talent, avec Mario Adorf et Angela Winkler parfaits sous les traits du couple, Daniel Olbrychski émouvant dans la peau du cousin/amant de la mère, et l'apparition de Charles Aznavour en commerçant juif.

 Oeuvre dense, émouvante et décalée récompensée par une Palme d'Or, Le tambour est un film marquant qui mêle réalisme et absurdité. Un conte noir, épique et sublime, touché par la grâce.

9/10



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  • : Le Point Critique
  • : La longue élaboration de ce blog de critiques cinématographiques est le témoignage de ma passion pour le Septième Art. J'écris ces critiques davantage pour partager mon point de vue sur un film que pour inciter à le voir. Ainsi, je préviens chaque visiteur de mon blog que mes critiques peuvent dévoiler des éléments importants de l'histoire d'un film, et qu'il vaut donc mieux avoir préalablement vu le film en question avant de lire mes écrits.
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  • Depuis très jeune, l'art est omniprésent dans ma vie: cinéma, musique, littérature... Je suis depuis toujours guidé par cette passion, et ne trouve pas de plaisir plus fort que de la partager et la transmettre aux autres.
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