Dernier film des Frères Dardennes, Le silence de Lorna rassemble toutes les qualités qui ont fait la spécificité des deux cinéastes français.
En premier lieu, Le silence de Lorna met en avant une actrice: Arta Dobroshi, merveilleuse découverte qui porte le film sur ses épaules. Elle confère toute l'ambiguité nécessaire à son personnage qui sombre dans l'illégalité et la complicité de meurtre pour réaliser son rêve. Seulement, l'amour va s'en mêler... Alors oui, l'évolution de la relation entre Lorna et Claudy se révèle prévisible, mais l'ensemble impose, comme dans chaque film des frères Dardennes, un constat social fort et sans concessions sur une société capitaliste de plus en plus destructrice. La mise en scène est brillante: sa rigueur, sa sobriété, son refus de la démonstration ou du sentimentalisme, sa volonté toute puissante de s'inscrire dans une veine purement naturaliste en font une fenêtre sur le monde pleine de vérités. Peinture d'une humanité sans cesse malmenée par une société de plus en plus insensible, Le silence de Lorna est aussi (et peut-être surtout) un fabuleux portrait de femme, pleine de doutes, d'espoirs, de désillusions, et qui, au final, entrevoit la possibilité de recommencer une nouvelle vie. Les frères Dardennes sont toujours aussi forts pour la direction d'acteurs car, derrière Arta Dobroshi, les seconds rôles sont finement campés, notamment Jérémie Rénier extrêmement convaincant dans la peau d'un drogué fragile et désespéré. Au final, Le silence de Lorna se nourrit d'un scénario dépouillé qui va à l'essentiel, et remarquablement mis en valeur par la réalisation impeccable des frères Dardennes. Si les enjeux se révèlent plutôt prévisibles, il n'empêche que l'ensemble fascine, par son authenticité, sa sensibilité, et par les excellentes interprétations d'Arta Dobroshi et de Jérémie Rénier.
8/10